Raymond Avocat, avocat au barreau de Versailles

Litiges : le développement de la culture de l’amiable

Si, pendant longtemps, les salles d’audience ont été les seuls lieux de résolution des litiges civils, un changement s’amorce sous l’impulsion de réformes successives de la procédure civile accordant une place toujours croissante à l’amiable, que ce soit en amont ou au cours du procès. Cette évolution se manifeste par l’essor des modes amiables de règlement des différends dits « MARD » et par la création de nouveaux outils mis à la disposition du juge, tels que l’audience de règlement amiable (ARA). Pour le justiciable, cette transformation impose d’adopter les bons réflexes dès la naissance d’un différend : le recours contentieux n’est plus le seul chemin vers la résolution de son litige.

Qu’est-ce que les « MARD » ?

Les modes amiables de règlement des différends, plus communément appelés par leur acronyme « MARD », désignent l’ensemble des procédures et processus permettant à des parties en conflit de parvenir à une solution négociée en dehors de la voie judiciaire classique.

Ils reposent sur la recherche d’un accord volontaire, plutôt que sur une décision imposée par un juge. Ils constituent une alternative au procès. Notons, toutefois, que « MARD » n’équivaut pas à absence de juge.

En effet :

  • D’une part, à l’issue d’une procédure amiable, le juge peut être saisi pour homologuer l’accord trouvé, lui conférant alors force exécutoire (Article 1543 du Code de procédure civile).
  • D’autre part, le juge peut être, lui-même, à l’origine de la résolution amiable du litige dans la mesure où il peut enjoindre les parties, sous peine d’amende, à avoir recours à une mesure de conciliation ou de médiation en cours de procès (Article 1533 du Code de procédure civile).

Quels sont les différents modes de résolution amiables des différends ?

Aux termes du livre V du Code de procédure civile (Articles 1530 à 1568 du Code de procédure civile), les modes de résolution amiable des différends sont :

  • La conciliation ;
  • La médiation ;
  • La procédure participative.

Conciliation et médiation « s’entendent de tout processus structuré par lequel plusieurs personnes tentent, avec l’aide d’un tiers, de parvenir à un accord destiné à la résolution du différend qui les oppose » (Article 1530 du code de procédure civile).

Ces deux mécanismes ont en commun de :

  • Reposer sur l’intervention d’un tiers neutre, impartial et indépendant,
  • Être couverts par le principe de confidentialité
  • Pouvoir être conventionnels ou judiciaires selon le cadre dans lequel ils s’inscrivent (hors procès ou en cours de procès).

Toutefois, il existe une différence majeure entre ces deux mécanismes : tandis que la conciliation est gratuite, la médiation est payante. En effet, si le conciliateur est un bénévole, le médiateur est un prestataire privé.

La procédure participative, quant à elle, repose sur un contrat par lequel les parties, chacune assistée d’un avocat, s’engagent à œuvrer conjointement et de bonne foi à la résolution amiable de leur différend (Article 1538 du Code de procédure civile).

A la différence de la médiation ou de la conciliation, en matière de procédure participative, nulle intervention d’un tiers, tout le processus se déroule entre les parties et leurs avocats respectifs. Ainsi, les avocats encadrent les échanges, organisent la communication des pièces et favorisent la recherche d’un accord.

En tout état de cause, qu’il s’agisse d’une médiation, d’une conciliation ou d’une procédure participative, l’accord obtenu peut-être homologué par le juge (Article 1543 du Code civil).

Dans quels cas le recours à l’amiable est-il obligatoire ?

Si, par principe, les procédures amiables ont un caractère facultatif, il existe deux exceptions majeures :

  • Tout d’abord, dans certaines matières et devant certaines juridictions, une tentative de règlement amiable entre les parties peut être un préalable obligatoire à la saisine d’un juge (Article 750-1 du Code de procédure civile). Tel est le cas, entre autres, des demandes en justice tendant au paiement d’une somme n’excédant pas 5 000 euros, de celles relatives aux troubles anormaux de voisinage ou au bornage. A défaut, la demande du justiciable sera automatiquement jugée irrecevable.

 

  • Ensuite, l’obligation de recourir à l’amiable peut venir du juge lui-même qui dispose d’un pouvoir d’injonction en ce sens sanctionné par une amende civile (1533 du Code de procédure civile).

Le recours à l’amiable peut donc être imposé par la loi en amont du procès et par le juge en cours de procès en dépit de la volonté initiale des parties.

En cours de procès est-il encore temps de recourir à l’amiable ?

Le temps de l’amiable ne s’arrête pas une fois l’assignation signifiée et le juge saisi.

En effet, en dehors des cas ou le juge les enjoint en ce sens, les parties peuvent toujours transiger, décider d’entrer en conciliation ou en médiation (Article 1528-1 du Code de procédure civile). Ainsi, même lorsqu’un procès est engagé, rien n’interdit de continuer de rechercher un accord par la voie alternative de l’amiable. Cela peut présenter l’avantage de raccourcir le délai de traitement du litige tout en minimisant les coûts.

Quels sont les avantages de l’amiable ?

Les deux freins principaux à l’engagement d’une procédure judiciaire sont : le coût et le temps. En effet, difficile de nier que le temps de la justice est un temps long ou que les frais à engager par le justiciable peuvent être importants.

Or, les procédures amiables constituent un compromis intéressant : non seulement la durée d’une procédure amiable est plus courte qu’une procédure judiciaire classique mais également son coût demeure généralement limité.  Au-delà, les procédures amiables offrent une certaine souplesse aux parties qui ne subissent plus mais deviennent actrices de la résolution de leurs litiges. Par ailleurs, le recours à l’amiable permet de préserver les relations entre les parties, la démarche favorisant la collaboration plutôt que le conflit.

L’amiable offre des avantages indéniables à ne pas négliger.

Recommandations

  1. Agir rapidement dès les premiers signes de désaccord. Un différend qui s’installe devient plus difficile à résoudre.
  2. Privilégiez, en première intention, la recherche d’un règlement « direct » du différend. Une discussion franche, un courrier courtois ou une rencontre peuvent suffire à lever les incompréhensions. Trop souvent, un différend persiste faute de communication claire.
  3. En cas d’échec du dialogue, il importe de « formaliser » le différend par étape. D’abord, une relance rappelant vos demandes, ensuite une mise en demeure précisant les défaillances et le délai de réponse souhaité, enfin, si cette mise en demeure reste infructueuse, un écrit constatant l’échec de la démarche, préparant ainsi la suite du processus (amiable ou contentieux).
  4. Examinez les différentes procédures amiables disponibles.
  5. Si la voie amiable est retenue, gardez à l’esprit :
    • Une issue judiciaire est toujours possible.
    • Si un accord est trouvé, il peut être formalisé par écrit puis homologué par le juge.
  6. Si la voie judiciaire est choisie, gardez à l’esprit qu’un règlement amiable est toujours envisageable.
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